samedi 6 septembre 2014

long contour au lent trou



  Roland Topor



le sang est noir
il y a ce trou chaque jour qui ne s'écoule pas, 
puis chaque nuit vers 3:00 qui dégouline en intérieur, comme si les larmes cherchent à fluidifier ce noir épais
je pleure de ma crédulité à ne pas t'avoir écoutée : qu'aimer plusieurs mois ou plusieurs années ne revient qu'à des cartes à abattre pour partir, aimer n'est qu'un terrain de solitude, un jeu de vides

tu as le goût de me souhaiter toute l'auto-poïétique possible, comme une dernière dislocation
d'où tu ne réalises pas que ma bâtardise se nécrose saoule de double-binds

des fois quand il y a la peur hurlante de ne plus comprendre la moindre valeur j'écoute ta voix sur des enregistrements, 
je ne te reconnais plus, ne comprends plus si cette voix a existé chaude ou déjà froide, présente ou déjà absente
tu me fais réfléchir à combien de temps nous durons à ne pas durer
la douleur de ton départ je vis pleinement avec, je n'ai pas tes valises de silence pacifique pour savoir quitter, je sais juste être nomade en la douleur
on m'a dit que ça continuait « 3 ans, comme une longue et lente fièvre », la seule durée que je conçois, que j'accueille

je n'attends plus rien
en personne, de personne
tu m'as transmis à ne plus cr[n]oire aux chaleurs de demain
sachant désormais que tout est explosion dans la gueule, dans les tripes, la fuite juste après les caresses, la tendresse comme se clouer adieu
suis cet animal noir qui donne juste le temps de ce qui peut briller au noir, je donne aussi généreusement que tu l'as [cru] aimé, je n'arrêterais jamais de donner aux gens qui cherchent à être beaux
tu disais « "les gens" ça n'existe pas » (tu connais bien mieux ma langue natale)
je suis un gens



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