jeudi 29 mai 2014

vont [pour rien]


00:00
qui est en fait 00:59
d'où j'écris à Buddy : de toute façon, zéro [.]
minuit, à minuit
je n'y dors plus à minuit
j'erre empaqueté de nuit
le cul nu le coeur nuisette
anodin la journée, animal avant le prochain jour
être si triste c'est savoir être fou
pouvoir être fou
pouvoir aimer comme ça
je n'aim//e///r////ai/////s que les fous

à la fermeture j'évite de partir je m'éloigne de rentrer ___ clore la bouche les artères l'anus
je vais voir la bibliothécaire, elle sourit encore, je l'imite (limite), lui dis « vous avez été mutée ? », dit « oui, vous aussi vous avez... », dis « été muté, oui en quelque sorte »
on parle faible
on parle toujours un peu plus bas que ce qu'on dit
je parle sur la coursive des phrases, les autres sont aux balcons

K. m'offre un Beckett
         parce que je lui ai dit [sais plus quand]
que j'aimais lorsqu'elle m'en a lu 217 fois
suis heureux et triste qu'il me l'offre
K. est fatigué de sa folithium mais il le lit péniblement mais il lit (en ponctuant son étonnement de la ponctuation, ~Beckett wins~je réalise qu'écrire bien plus que pour des romans il écrit pour le lecteur/liseur~)
c'est juste beau-très, je souris ailleurs, il dit ému « ça te fait sourire », je crois qu'il m'imite (limite)
surtout il dit « je n'lis pas bien, j'lis moins bien qu'elle, hein ? »
arrête... continue... juste lis...
         parce que je ne lui dis pas [sais plus comment]
que personne ne lit comme elle
alors il lit personne
surtout Beckett, qui arrive à tout en ne sachant rien |dire|
.rien.ride.nier.dire.

rideS. Mme <
elle dit « je vous comprends mais je ne me comprends plus »
n'arrêtant pas hier de me demander « ... c'est quoi le mot... ? »
tout est une boucle non éphémère Samuel
boucle avec souterrains & coursives
elle ajoute  « je perds les mots, ils ne sont plus... ils... je n'ai plus... le mot... vous comprenez ? »
on va faire sans les mots, je lui dis
sans les faibles
: les mots peuvent vous lâcher, je ne vous lâcherai pas, je suis là, pas besoin de mots
d'entendre ceci son visage sourit alors tant qu'on dirait un chiffon froissé

arrête... continue... 
juste tais-moi
bouche artères anus
je crois que tu es belle si c'est le mot
sur le p00n:t00n je te cherche les forts
qui sont silencieux sont fous sont tout
mais qui ne devraient* pas être seuls, qui ne devraient pas te chercher seuls
vont se perdre de ride en ride

comment tu dis ?






* "devoir"
devoir mouroir
ou devoir pouvoir ?
nous passons nos journées à des devoirs
: devoirtravaillertravaillertravailler pour devoirfacturer pour devoirdemeurer
? c'est quand les devoirs=pouvoirs battants étincelants absolumants



mardi 27 mai 2014

« Ce qui relèverait d'une conception extrême pour votre confort serait une analyse radicale et nécessaire pour d'autres. » (Po B. Lomami)


Hier je monte dans le bus, il y a parmi les passagèr-e-s une autre personne handie, nous échangeons un simple bonjour et je m'installe sans rien d'extraordinaire. La banalité quotidienne est éclatée par le chauffeur beuglant au travers du bus humainement rempli : « les personnes en fauteuils là vous vous arrêtez oùùùùùù ? »

Prenant 2 à 6 fois* quotidiennement le bus dans cette moderne ville atlantique (et autres nationales similaires), moi, pâle nabot et subalterne passager-client tétraplégique en fauteuil électrique, j'atteste :
- être de la sorte publiquement alpagué sur la moitié de mes montées dans des bus [*faire le calcul sur ne serait-ce qu'une semaine]
- avoir intérêt à répondre dans les cinq secondes, sous peine d'un deuxième beuglement
- ne pas avoir intérêt à ne pas être encore décidé sur mon choix d'arrêt, sous peine de réprimande
- ne pas avoir intérêt à vouloir changer d'avis durant le trajet, sous peine de réprimande
- être un passager tout à fait averti et pratiquant de la fonction du bouton sur lequel appuyer pour signaler au-à la chauffeur-euse quand vouloir descendre.

Hier j'ai la 'chance' pour une rare fois de ne pas m'encaisser seul ma minute subalterne. Un peu hésitante mais pressée avant la deuxième sommation, la femme handie concède à la criée le nom de son arrêt, dans la même cohue informative je divulgue également le mien. Sauf qu'à ce moment la femme me regarde et s'exclame : « non mais c'est n'importe quoi qu'on nous demande de faire ça ! ». Durant trois secondes j'hallucine qu'une autre handie constate le même uppercut dans le plexus solaire que je me reçois si fréquemment, suis presque bouleversé à pouvoir accuser de cela avec quelqu'une.
Cette femme a réagi à voix haute, et c'est aussi distinctement que je lui réponds « entièrement d'accord ». Elle balbutie, mi-choquée de l'acte discriminatoire et mi-coupable de notre concession (et c'est toujours cette double réalisation qui fait longtemps mal ensuite, bien après être descendu-e-s du bus), « et en plus il nous prend pour qui avec son "les personnes en fauteuil là" ?! », j'ajoute « en fait nous sommes des sous-passagèr-e-s, on doit se décliner, et notamment ça ne lui viendrait jamais à l'idée de demander cela à absolument tou-te-s les passagèr-e-s... ». Elle acquiesce vivement.
Et nous baissons les yeux, chacun-e plongeant intérieurement dans une lassitude biographique que je connais par [é]coeur[ement]. Ça n'ira pas plus loin, ce qui me mélange à ce moment entre le regret et la fatalité. Sauf réalisant qu'être à côté de cette femme durant les dernières minutes de mon trajet m'empêchera une coulure sans fond, de son acte non minimal d'avoir déclaré l'abus, ainsi que la reconnaissance commune de celui-ci.

Ce midi je monte dans un bus pour aller bosser, à peine installé le chauffeur me crie « vous descendez à quel arrêt ? ». Je suis le seul handi, je suis fatigué moralement, pourtant j'hésite, j'hésite de ces quelques secondes où l'attente du chauffeur est une torpille, mais surtout où beaucoup de regards des autres passagèr-e-s se scotchent sur moi depuis un longitudinal silence... j'hésite en pensant à cette femme d'hier... mais il y a aussi le regard en attente de mon assistante, une récente recrue qui ne semble pas réagir au validisme... J'abdique : je donne le nom de mon arrêt.
L'assistante me regarde interrogatrice du délai que j'ai pris pour répondre. Espérant désespérément un ersatz de la solidarité vécue hier, je lui formule « c'est abusif à force que les chauffeur-euse-s demandent cela aux handi-e-s », elle répond - comme plein d'autres personnes l'ont déjà fait - « oh il voulait faire bien ». Cette réponse m'accule dans une zone que je connais trop bien : Charles il exagère. Charles il voit le mal partout. Charles-l'handi il souffre alors il est aigri. Charles il n'est pas clément envers la méconnaissance des gens. Revenant toujours à : Charles il est radical.

Ce soir est publié ce court texte de Po B. Lomami (collègue d'une collègue bruxelloise, les subalternes adorent rigoureusement travailler ensemble, c'est plus fort qu'elleux), issu du blog "équimauves" .
Charles il trouve : pas mal du tout. Pas d'accord avec tout (notamment l'aspect démocratique et sur la notion du « réel »), mais la posture d'une recherche-action{-création} profonde, oui oui.




Radical ce n’est pas extrémiste, et ce n’est pas normal non plus

[...]


Il faut arrêter de confondre ou amalgamer radicalité et extrémisme.
L’extrémisme peut servir de base théorique à des mesures et actions qui vont à l’encontre des intérêts et/ou de la volonté de tous. Comprenez-vous le sens et le poids des mots que vous employez ? La radicalité elle, n’est ni une pratique précise, ni un programme idéologique ou politique. C’est une attitude que l’on adopte face au réel et à sa propre vie, un état d’esprit pour voir et analyser les situations, les intérêts et les rapports de force. C’est vouloir identifier et appréhender un problème ou d’un phénomène à la racine, à ses fondements. Etre radical•e, c’est d’abord produire une analyse radicale qui veut appréhender le sujet de l’analyse à sa racine, ce qui est marginal dans notre société. C’est une critique profonde.

La radicalité est toute relative, relative à un espace-temps et à une tiédeur conciliante. De plus, bien souvent la traduction d’une analyse radicale en pratique résulte en un projet pas aussi effrayant que l’on croit étant donné qu’il veut s’inscrire dans et en fonction d’une politique démocratique. En plus de cela, le projet d’action cède toujours quelque chose, par fois grand chose, dans sa réalisation. Il n’échappe pas aux compromis et pourtant il n’est pas pour autant destitué de son étiquette "radical" et est souvent poussé dans la case "marginal" par la peur du changement qu’inspire sa prétention radicale. La radicalité politique n’ignore pas que le pouvoir résistera, parfois violemment, au changement qu’elle inspire ni que l’apathie est bien installée. C’est une position prise et une prise de position basées sur des analyses concrètes des réalités, c’est tirer un enseignements des expériences en identifiant les causes profondes et en tentant de repousser les illusions, les a priori, les faux semblants. C’est regarder ces réalités sans détours et sans indifférence. C’est en tirer les conséquences jusqu’au bout et les traduire en raisonnements, puis actions sur le réel. La radicalité concrète, vous pouvez l’observer autour de vous si vous regardez bien. C’est clairement et précisément passer des grandes idées et grands discours aux décisions, mesures, actions qui dans leur détails font de ces idées et discours des vecteurs concrets d’outils efficaces pour la défense des intérêts individuels et collectifs dans nos réalités quotidiennes. Concrètement donc, c’est rendre cette analyse radicale disponible pour l’action. C’est un changement de mentalité et sa matérialitisation. C’est démontrer par l’analyse radicale et les faits réels que les propositions ne sont pas des "fabulations extrémistes", qu’il y a réflexion et stratégie. C’est reconnaître que ce sera difficile, par ce que c’est radical. Il n’y a pas de difficultés dans la superficialité. C’est aussi montrer que c’est possible et nécessaire et donner les moyens à chacun•e d’en prendre conscience. Du coup, on ne s’étonne pas de l’invisibilisation qu’on lui réserve et cultive. C’est se coltiner la réalité au quotidien et en tirer une analyse, un raisonnement et des actions pour l’améliorer sur le plan individuel et collectif. En somme, ce qui vous fait peur c’est l’analyse radicale, la réelle remise en question qu’elle impose et le changement qu’un projet concret qui en émergerait susciterait. L’analyse radicale fait partie de l’émancipation redoutée. L’émancipation de tou•te•s, individuellement et collectivement, c’est peut-être ça que vous avez perdu de vue. Pendant que d’autres la pense et tente de la pratiquer, vous les diabolisez. Et ça foire. Non, une politique radicale ne signifie pas une politique extrémiste. L’émancipation n’est pas tiède. Si des gens pensent toujours l’émancipation, individuelle et collective, aujourd’hui, c’est peut-être parce qu’on n’y est toujours pas. Dans ce sens, les radicaux•ales que vous pointez du doigt, vous les produisez, notamment par apathie et faux-semblants. Il faudrait peut-être entamer une analyse radicale de votre production.

Ce qui relèverait d’une conception extrême, ou extrémiste comme vous vous acharnez à le dire, pour vous (et votre confort) pourrait être tout simplement une analyse radicale et nécessaire pour d’autres en fin de compte. L’extrémisme, c’est refuser toute alternative qui ne correspond pas à une doctrine. Interrogez-vous sur les mots que vous employez. Où sont les idées violentes ? Où sont les idées d’émancipation ? Alors oui, c’est à l’extrémité du champ politique que vous représentez une politique dite "radicale". Dans un spectre centré en une norme discutable on la place à l’extrême. Et on parle d’extrême. Oui radical c’est pas normal. L’info exclusive est que ça ne fait pas des personnes porteuses d’analyses radicales des ignares extrémistes systématiques.

Après on pourra discuter des conceptions de l’émancipation et de ses politiques.

Voilà, moi qui voulais juste écrire trois phrases à l’arrache… Pardon pour le bla bla.
Et sinon, je ne suis pas philosophe, sociologue, ou politologue. Donc voilà, c’est pas une thèse. [EDIT: Non mais limite je m'excuse quoi. Faut que j'arrête l'auto-censure sérieux]
[Retourne bosser gentiment]



+ De l'anthologie mythique : http://archivesautonomies.org/spip.php?article9
Incomparable aux politisations handies françaises tristement unisectionnelles depuis cette époque.



samedi 24 mai 2014

Ingrédients photographiques nocturnes.


| rentrant du cinéma, "Jonas Mekas / José Luis Guerin - Cinéastes en correspondance"
Guerin : sa voix calme et sensible, avec ses regards indirects délicatement rebondissants, dans des flaques d'eau grouillante/s, dans des branches d'arbres serpentines, dans la parfaite jonction d'un rideau d'hôtel face aux vagues de l'Atlantique portugais ; filmer l'urbanisme d'une ville par toutes ses étoffes
| dehors sur le trottoir en attendant le bus il y a la ville typique du vendredi nuit
la ville imbibée avec sur le trottoir de droite un groupe de personnes ivres, leurs expressions corporelles s'expriment par arcs : arc de la voix criée, arc des ricanements distribués en cercle, arc de leur thorax qui se courbe vers leur bassin pour appuyer les propos, arc de leurs bras cherchant constamment à alpaguer le-la pote d'à côté
la ville frustrée avec sur le trottoir à gauche après les rails de train deux travailleuses du sexe qui dandinent leur cul (presque un mouvement en arc) pour semblerait-il bien plus se réchauffer du crachin froid plutôt que de vendre du déhanchement
| de ma position médiane j'aime cet arrêt de bus mettant en perspective sur seulement plusieurs mètres le bitume du trottoir d'où je suis, le grillage, les quatre rails, les poteaux de signalisations ferroviaires, un autre grillage, un autre bitume, la route derrière avec les phares de voitures ; je cherche une fois de plus comment je pourrais photographier tout cela en enfilade (sans humain saisis, rarement envie)
| dans le bus le type d'à côté essaie de me regarder lorsqu'il pense que je ne peux pas le déceler, sauf qu'en oculaire l'angle technico-mort est un angle sensori-vif, je sens combien il me regarde ; et je me dis : suis constamment regardé de haut, je serai toujours le petit mioche des grand-e-s valides (me visualise Izlé s'accroupissant fréquemment pour me parler, particulièrement touchant pour moi)
| descendant du bus j'arrive dans mon quartier qui est d'un tel silence la nuit qu'en avançant je cherche à entendre les battements de mon coeur, mais se fait bien plus fort la gomme de mes pneus qui embrassent l'asphalte pluvieux, le son de lorsque les gosses exagèrent le bruit d'un baiser
| marchant les dernières rues pour rentrer à ma cabane je retrouve sur un mur une longue fissure horizontale, absolument superbe, une lente pulsation urbaine, elle a quelque chose d'épidermique, et de sensuelle avec l'humidité de la pluie qu'elle garde sur quelques millimètres en bordures ; ça fait 3 mois que je veux la photographier
| de la photographie il y a demain (aujourd'hui) une expo collective où Prof a à tout prix voulu « m'exposer », moi je déserte, mais il imprime cinq de mes photos et agence l'accrochage ; m'envoyant il y a quelques nuits depuis mes silences un mail censé me repêcher avec « très sincèrement, certaines de tes photographies sont les meilleures que j'ai pu voir de la part d'un de mes élèves depuis que je donne ces cours en 2008 et de loin! »
| je n'ai jamais compris pourquoi faut-il dire « sincèrement » dans des propos, tout ne devrait pouvoir être que sincère, je l'utilise très rarement ce mot, seulement lorsque je crains que la personne puisse penser que j'arrange du discours plutôt que de dialoguer ; à vrai dire dialoguer ne devrait se faire qu'avec 

des vagues
des étoffes
de la nuit
des thorax
des bras
des trains
du sensori-vif
des silences
des baisers
des pulsations
des sensualités.


vendredi 23 mai 2014

Vernissage.




Les messages de la Duchesse s'additionnent sans que je parvienne à y répondre, elle et d'autres. Comme lorsque vous regardez le téléphone sonner, bien plus que de l'écouter sonner vous le regarder en train de sonner, du bout de la pièce, vous observez s'il va vous apercevoir ne pas le décrocher, vous le guetter vous vouloir. Vous voudriez que ce soit quelqu'un-e d'autre qui manifeste le téléphone, tout en ayant honte de cette pensée, la honte encore. Vous restez caché-e.
Je reste caché. Tente tardivement quelques lignes à la Duchesse, lui mentionnant l'impression d'avoir une grenade à la place du coeur, alors de ne pas trop la bouger, de rester caché à regarder les jours sonner. Je lui dis cette impression d'être un étranger à mes propres journées. J'engrène les simulacres de quotidienneté basique et de mise au travail, ça fait tourner la machine rassurante pour les alentours. Je lui explique que lorsque la nuit tombe je deviens honnêtement sombre, de la même honnêteté que la nuit qui se noircit sans chercher à paraître ensoleillée. J'éteins les jours en pensant à elle sans elle

Je parle pour ainsi dire uniquement à la Ko-Pilot, qui me dit de venir à des horaires précis car « je voudrais plus de temps avec vous », constatant en effet qu'elle congédie les autres inconnu-e-s 15 minutes plus tôt. Elle me demande si je réalise que j'ai dépassé la folie familiale (« que votre mère vous mordait physiquement atteint tout simplement la folie ») pour tout transformer en force de vie et d'amour, que je ne cesse de me « risquer à vivre »... J'entends Izlé me considérer immature de ne pas assumer le risque d'une rupture et d'y être blessant, je réponds à la Ko-Pilot que son propos est faux, que je ne sais pas vivre et encore moins aimer.

J'écris (trop, salement) et je lis (déconcentré) comme une folie fidèle, comme une boucle random dont l'importance est que ça ne s'arrête pas. Sachant ne plus supporter perdre, perdre les organes qui font vivre, perdre les personnes qui font vibrer. (« Ce qui se perd me perd » a commenté mon cerveau hier en rentrant.)
Tenter quelques lignes à la Duchesse, quelques autres cette nuit à Jo, essayer de ne pas perdre les ami-e-s_sans_organes.


mercredi 21 mai 2014

&


"Différence et répétition" de Deleuze ramené de la bibliothèque.
Allant à la bibliothèque et aux librairies d'occasion plus souvent qu'aux courses alimentaires ces derniers temps, les livres étant ce qui me re/tient un peu de la confusion chaotique. Parvenant à lire des pages bien plus qu'à voir des personnes.
Ce livre a l'air d'un baume. Beaume. Bhome. 
D'un puissant labyrinthe dont il ne faut pas hésiter à fermer les yeux afin de chercher les directions avec tout son corps au contact des murs.
Il y a quelques jours j'ai regardé très longtemps en ville au pied d'un arbre un amas de hautes herbes de type graminées prendre le vent, aller et venir, ou bien attraper le vent, c'est ce que je me suis demandé indéfiniment : qui du vent ou des herbes fait balancer, qui touche qui, à l'aller si c'est le vent qui fait doucement courber les herbes alors ne serait-ce pas les herbes au retour qui plongent dans le vent ? Aucune conclusion, si ce n'est que ce fut un rare moment de grâce visuelle & sensitive (((ce qui me fait en revenir à « autistiquement » : il s'agit peut-être d'une perpétuelle histoire d'&, de dilutions d'et et et et...))). Cette image toujours sensiblement vive m'est réapparue à la lecture de "Différence et répétition".

Répétition.
La nouvelle psychanalyste - sera nommée Ko-Pilot - m'a en partie rassuré d'une étagère de sa bibliothèque remplie de Foucault. M'en suis rendu compte après lui avoir biographé en express que Foucault m'avait probablement sauvé du joug familial et enclenché toute une émancipation intellectuelle vers mes 17 ans. La première rencontre avec elle, certes parcellaire, fut néanmoins tentante pour entamer comme je lui ai dit du « ping-pong » ; ne serait-ce que de son accessibilité architecturale (échec d'une vingtaine d'appels), sa considération d'un tarif précaire, son appartenance plutôt lacanienne, et sa sensibilité non hautaine à propos de l'autisme finement capté.
Néanmoins ce jour, las de mes propres circonvolutions analytico-culpabilisatrices, je me posture d'emblée sur mes gardes, lui sommant notamment de ne pas me sortir le coup de « la répétition » à propos de mon parcours relationnel intime, sentant que si elle distord une infime matière de ce que je ressens dans le coeur je lui arrache la carotide. Sauf que je suis inutilement carnassier, cette femme d'un calme attentif me répond avec bienveillance : « on ne répète jamais le même ». Dis donc, high five avec Gillou, l' « énième puissance » & tutti quanti.

Tuquan ttiti.
Je retrouve cet après-midi Mme S. après 15 jours d'absence, et je la découvre dans un impressionnant état de désorientation verbale. Son humour malicieux est tel que les premières minutes de nos retrouvailles je me demande si ses phrases incohérentes et incapables d'être finies ne sont pas une invitation ludique qu'elle propose. Sauf que tout se lit dans des yeux et que je remarque rapidement que les siens sont angoissés et tristes. Une phrase qu'elle prononce aujourd'hui contient comme une dizaine de phrases, les mots sont accrochés en même temps qu'ils se décrochent les uns des autres, elle lutte au milieu de sa phrase qui dégringole déjà vers une fin vague dont elle recherche à comprendre ne serait-ce que le début.
Je suis bouleversé et fasciné à la fois. Mais surtout très ému à déceler sa détresse, car elle semble signifier par plein de mots azimuts que quelque chose « ne va pas » dans sa tête qu'elle me montre à un moment du doigt et qu'elle a étrangement aujourd'hui entourée d'un foulard noir (foulards qu'elle met toujours autour de ses épaules). J'essaie d'être attentif le plus calme possible, calme nécessaire notamment depuis l'épuisement que m'entraîne son particulier codage langagier, j'essaie de dialoguer avec certains mots que je sélectionne par l'intensité qu'elle y met. Je parviens à lui entraîner trois éclats de rire, me persuadant qu'elle me comprend, bien qu'elle repart immédiatement après dans une incohérence à toute allure.
Il y a ce moment vers la fin de notre session où elle me regarde anxieuse en me disant « je ne suis qu'une moitié aujourd'hui ». Ce qui me touche profondément. Je lui réponds que je le sens, que j'y suis attentif, et que pour autant j'aime la moitié d'elle « qui est pleinement là ». Émue elle me demande « c'est vrai ? », je réponds que oui. J'ajoute « aujourd'hui vous parlez comme un grand poème ».

La quitter sera très pénible. Je la laisse ensevelie dans un vaste fauteuil jaune d'une salle commune dont elle ne comprend plus la localisation, déblatérant des tonnes de mots qui ne construisent aucune phrase 'intelligible' mais qu'elle destine à me retenir. Dans le couloir d'où je pars j'observe avoir une boule dans la gorge qui larmoie, avec des images fantomatiques de ma mère dans ses innombrables discours maniaco-dépressifs, de Céc durant son épisode schizophrénique fulgurant... Ce n'est pourtant pas du tout la première fois que je côtoie des dialogues délirants(-prodigieux), mais je réalise tenir très fort à Mme S. Je bifurque subitement ma destination du bureau pour aller à celui de son infirmière de secteur, surpassant ma terreur de communiquer avec une inconnue. L'infirmière ne daigne pas me parler, mais une aide-soignante m'indique qu'elle et ses collègues constatent préoccupé-e-s depuis 48h cette forte désorientation de Mme S. et que le médecin a été appelé pour passer demain.

En revenant vers mon bureau je me rappelle avoir appris ce matin qu'Oury est mort la semaine dernière. 
Semaine dernière où Bro était chez moi, absolument sans savoir ni lui ni moi le décès d'Oury (survenu je pense juste le lendemain !) j'ai introduit une discussion par « il ne va pas tarder à mourir Oury... », ce qu'il a acquiescé, puis me racontant tout ce qu'il avait observé de lui à La Borde. Et nous avons déroulé cette fréquente discussion sur la folie, sur ses institutions, sur pourquoi nous avions arrêté lui et moi et deux autres camarades nos soirées publiques sur la psychothérapie institutionnelle, les livres que nous nous conseillions, les domaines professionnels dans lesquels nous essayons du mieux possible - du mieux respirable - de mettre à l'oeuvre nos apprentissages en la matière...
Bro la semaine précédente au téléphone m'avait dit combien il avait peur d'être fou comme notre mère. Ça m'avait terrifié, non pas l'hypothèse bien connue, mais son angoisse que je n'avais jamais mesurée à ce point. Il m'informe notamment d'un énième fait que j'avais mis aux oubliettes : que notre mère avant nos naissances avait été internée en HP. Je prends le temps d'en discuter ouvertement avec lui lorsqu'il est chez moi, du moins du plus longtemps possible de ce qu'il supporte depuis sa tristesse, mais il m'écoute, on s'écoute bien et fort cette fois-ci. Je suis laminé de cette folie-violence familiale, mais je dispose toujours de ce réflexe viscéral de le protéger du mieux possible, d'être là pour discuter, déposer avec lui (réalisant que je m'en sors peut-être 'bien' mieux alors que je fus le plus violenté) ; il me remerciera en partant, mutuellement émus. À vrai dire j'en suis venu à lui parler sans le savoir de "Différence et répétition", de la puissance de vie que nous avons su inventer depuis et au-delà de la violence...



lundi 19 mai 2014

Le plafond des bus.


Mon (523ème) neurologue est du style quarantenaire hirsute-séduisant, successful et dynamique, avec un goût pour l'autodérision et l'inconsidération des bienséances qui nous valent une reconnaissance mutuelle non dénuée d'un certain attachement, des dialogues soigneusement tragi-comiques. 
Après, bon, c'est un spécialiste à blouse blanche. C'est-à-dire tellement overbooké de l'Hippocrate et convaincu de ses interprétations qu'il en oublie que la personne qu'il torche en 15 minutes a attendu et cogité dans ses enzymes émotifs depuis 8 mois le rendez-vous. Ce n'est pas tant grave pour moi dans la mesure où j'ai toujours considéré que ces consultations pontificales sont majoritairement de la foutaise, du protocole pathologique, une sorte de visite obligatoire de vidange. (J'ai conscience ici d'être un petit con d'occidental bénéficiant de l'ALD et osant critiquer mon accès aux soins, mais vraiment parfois rencontrer John Pemberton à la fin du XIXe siècle équivaudrait.)

Aujourd'hui le neurologue était au comble de son absurde rôle (allant de paire avec son exténuation de surcharge professionnelle, j'en ai conscience). Il était ouvertement fou, du genre folie libérée ou exhibitionnisme kafkaïen. Ce qui était quelque part délicieux même si ce rendez-vous m'était un gros morceau.
Il a commencé ainsi :

- Bonjour M. Xavier [sourire ultradilaté, puis sans même me regarder], aaahh vous semblez avoir la forme !
- En quelque sorte, je suis claqué et j'ai un sale mal de crâne présentement...
- Très bien. En plus vous conduisez votre fauteuil parfaitement !
- ... Oui, depuis des années à vrai dire.
- Alors ces résultats !
- Tenez, la fiche est dans ma poche de chemise.
- ... [il cherche entre mes pieds]
- Ma chemise... mon vêtement « chemise »...
- ... [cherche toujours entre mes pieds]
- Hmm... regardez-moi, hop c'est là-haut que ça se passe : la chemise avec une poche sur mon torse.
- Ah mais oui ! Donc. [inspecte le document] Bon.
- ...
- D'accord.
- « D'accord » quoi ?! L'infirmière m'a rapidement dit que c'était plutôt bon.
- Disons que ce n'est pas trop mauvais.
- Ah, ça change d'ambiance.
- C'est parce que vous voyez le TCA, bon... Mais au niveau bicarbonates et mercure ils sont à [---ne me rappelle plus---] donc un peu élevés vu que le maximum est...
- En fait je suis trop fatigué aujourd'hui pour analyser, vous pouvez simplifier ?
- Ah oui. Vous êtes juste au plafond limite.
- Ah.
- Oui, juste-juste à la limite du mauvais. Vous voyez ça c'est le plafond [immobilise levée sa paume de main] et ça c'est vous [plaque fortement son autre paume contre la première]. Donc ça va bien. [garde les mains compressées l'une contre l'autre]
- Dit comme cela...
- Vous êtes au plafond.
- C'est exactement moi... La pneumo dit aussi que je suis à la juste limite des 30 % niveau CV.
- Alors ça concorde ! [exalte]
- Youpi.
- Vous verrez de toute façon tout cela avec elle. Autre chose ?!
- Pas spécialement, je n'arrive juste quasiment plus à déglutir...
- Ah, c'était déjà évoqué la dernière fois je crois.
- Tout à fait, du coup maintenant c'est...
- ... Pire !
- Bingo !
- [il sourit immanquablement] Comment faites-vous ?
- L'action de la gravité sur les aliments et la patience, ça descend forcément à un moment, un jour... Même si j'imagine qu'il s'agit de la gastrostomie à laquelle je devrais penser, mais bon hein.
- C'est parfait la gravité !
- ... Pas tant que ça en fait.
- Bon, on se revoit en pluridisciplinaire bientôt ?
- Pourquoi se revoir alors qu'on se voit déjà là ?
- Bah la dernière pluridisciplinaire c'était... [dossier] y'a plus d'1 an !
- Ah. On va se dire quoi de plus qu'aujourd'hui ?
- Je ne sais pas.
- Justement, j'hésite.
- Au moins on se reverra.
- Ça c'est de la perspective.
- M. Xavier, [il est déjà dans mon dos] je vous raccompagne ! [il gobe je-ne-sais-quoi de petit qu'il attrape sur un plateau à côté de plein d'ustensiles, qu'il s'envoie comme une cacahouète dans la bouche]

Considérer sa consultation du jour comme une performance plutôt qu'une analyse gazométrique. Et attendre la lecture de la pneumologue.
En attendant d'attendre, je considère le plafond.




**



C'est la sentir marcher à côté de moi qui me manquait le plus ce soir en regardant le bureau le lit le bureau le lit le bureau le lit mais pour ne rien comprendre de ces meubles qui ne parviennent pas à meubler le manque.
Ai presque souri. Le type qui officiellement ne marche pas mais aime terriblement sa démarche à elle. Marcher l'un-e à côté de l'autre comme deux poumons, afflux d'air influx sanguin.

À l'arrêt de bus je plisse fort les yeux, « arrête d'y penser » je m'indique sévèrement dans le noir de derrière les paupières. Réalisant que je me suis dit cela ce matin, hier soir, hier midi, les autres jours, et puis lorsque je marche d'un arrêt à un autre arrêt, même lorsque je suis dans le bus, autant que lorsque depuis le trottoir je regarde des bus passer.
En rouvrant les paupières c'est humide.

Je saisis mieux comment fonctionne un bus que ce qui se passe.
(Il ne se passe rien. Et ça se passe en tout.)


dimanche 18 mai 2014

« Ce petit tas de médicaments tous les matins c'est une bouffonnerie. »


Dans cet article à nombreux écueils, des notions/dénominations sont passionnément critiquables : maladie, mortalité (précoce), etc. De quoi faire trembler Canguilhem & Co. Ces termes volontairement utilisés revêtent, certes, une vigilance politique-philosophique, mais aussi la sensibilité d'une vie personnelle dont les zones vécues avec de plus en plus d'improbable/s évoluent à considérer du vocabulaire généraliste. Telle une banalité qui ne l'est jamais vraiment.


En ces temps rébarbatifs de festival du mucus (lubrifiant pulmonaire anti-sexy, immodéré, chronophage, homologue du Tabasco),
de ses sessions [en amélioration depuis 48h, hormis salive étouffante, ¡alleluia! précautionneux] d'expectoration / vision trouble / encombrement / asphyxie / expectoration / nausée / encombrement / céphalée, 
de son cocktail antibiotique + nébulisateur*
de son asthénie grandiose,
*  

il est de rigueur durant les quelques moments d'accalmie de réviser son Bob Flanagan, voulant y trouver quelques insolentes & téméraires inspirations pour tenir le coup moralement depuis la viscosité du quotidien alvéolaire. 
Le film documentaire "Sick" à propos de lui (mais dont sa partenaire n'a pas apprécié le sens que donne le montage final) qu'ai découvert en 2004, 8 ans après sa mort, était à cette période de ma vie une référence capitale. Époque où je questionnais péniblement ma mortalité depuis une dégradation physique que je ne concevais pas pouvoir durer plus que quelques années. Pourtant, 2014, je suis toujours « en dégradation opérationnelle », d'un étonnement considérable ; à la façon des 43 années vécues de Flanagan avec une mucoviscidose.

Flanagan mène désormais vers l'artiste Martin O'Brien, qui porte mon intérêt sur la notion d'endurance à partir d'une maladie chronique avec mortalité précoce, agençant par la même les disciplines biopolitiques qu'en tant que « malades » nous avons intégré à nous administrer quotidiennement.
Mais je souhaite relever ici ses extraits de dialogue avec la partenaire de Flanagan, Sheree Rose. La thématique m'intéressant est celle du partenariat intime entre une personne valide et une personne handie/malade, la gestion de la chronicité et sa mortalité. Me suis notamment souvent demandé comment Flanagan avait annoncé son « espérance de vie » à Rose, comment celle-ci avait géré l'information et la quotidienneté endémique. Quelques réponses évoquées ci-dessous.


A Dialogue with Sheree Rose

[...] Together during the 1980’s and 90’s Bob Flanagan and Sheree Rose made work that provocatively explored themes of pain/pleasure and sadomasochism, illness and death. Bob Flanagan suffered from Cystic Fibrosis (CF) and eventually died from the disease in 1996 at the age of 43, at the time one of the longest living survivors. He was a masochist and spent the last sixteen years of his life in a relationship with Rose during which he lived as her fulltime slave. [...]

Martin O’Brien:               
I'm interested in your memories of your time with Bob, and the way your work and life were so connected. [...] How did the way you dealt with CF differ in every day life and in performance? [...]

Sheree Rose:                   
[...] i met bob at a haloween party in 1980. [...] neither of us suspected, at that point, what our relationship would be. we just knew that we were kindred spirits and wanted to be together. on our first date, less than a week later, we finally saw our true selves - and we were not disappointed. bob liked that i lived in a nice house in a nice neighborhood. i liked how yound and cute-in a punky way-he was. [...] he was the man of my dreams - sexy, a poet and a musician, and with a great sense of humor. i was the woman of his dreams - older, more mature, needing someone to adore her! the s/m part came later. he told me was a submissive man - he wanted to serve a woman and anything she told him to do. i was very intrigued by this idea. i had been divorced for three years and was quite bored with the conventional men i has been meeting. we mutually decided to give it a go - for a short period of time-three months. [...]
i always knew bob would die young - his cystic fibrosis was a death sentence, and we never knew when it would come. originally, i was told he would live no more than two years - so a sense of urgency always was there. [...]
how did the way we dealt with cf in real life differ from how we presented it in performance. in the early days, cf wasn't so much of a problem. bob was young and healthy enough to do allmost anything. the work was much more about our sexual and artistic lives. we never hid the fact of his illness, but it wasn't the main focus. when he got sick and needed antibiotics, he went into the hospital - sometimes for three weeks at a time. i missed him terribly and knew he always had to submit to cf - it truly was in charge of his life. [...]
                
everyone with cf is given a death sentence at birth. of course, you can say that every human being begins dying as soon as he or she is born. we are given a certain number of breaths and some day, we will breathe our last one. the difference with cf people is that every one of their breaths is labored and that they know that their last breath can come at any time - usually sooner rather than later. this premature knowledge of this death sentence affects them in certain patterned behavior. [...]

Martin O’Brien:               
[...] Can you talk about the relationship between the hospital space and the bedroom/place of sex in your work? Could you articulate on a personal level how you feel about the work/ how the work makes you feel when you look back? [...]
Sheree Rose:                   
In the first week of our meeting, i knew about Bob's CF and about his SM. he told me he didn't have any time to waste on starting a relationship without "full disclosure". since i didn't know anything about either of these facts, and I was very attracted to bob, i decided to just plunge in, as it were, and gain some new knowledge and experience. In the beginning, the cf was a minor part of our activities. I saw Bob taking a lot of pills whenever he ate, and i heard him coughing. At the same time, he was cleaning my house, running errands, performing in a punk-rock band, and making love to me every night!  He truly seemed like a Superman - he was tireless in his devotion to me, his mistress. As the years went by, the cf became more and more obvious - but it didn't really enter into our bedroom SM activities. I treated him as if he had no life-threatening disease - I was determined to be more dominant than his illness. Of course, in the end, the cf was the deciding factor in his life and death. [...]
When Bob and I first got together, there were no obvious signs of cf on his body. He coughed, took handfuls of pills with every meal, and sort of looked like a heroin user (thin and edgy). He also had incredible energy and vitality - I had no idea how sick he really was.
As the years went by, cf gradually took its toll on him. There were stays in the hospital for antibiotic treatments, he went to physical therapy to loosen the mucus, the coughing fits were more frequent, he tired more easily. His body showed the effects of advancing cf [...].  Accordingly, the art work we did became increasingly focused on his health. Bob was always obsessed with his body - but now the focus was on the effects of cf. [...] As I said in Autopsy, "Bob gave me his body, it wasn 't much of a body, but I made the most of it."[...]


Donc Rose a entamé sa relation à partir de l'info qu'il n'y avait probablement pas plus de 2 années d'espérance de vie pour Flanagan (il avait alors 28 ans). Ce qui m'a bluffé. Non pas pour la statistique d'espérance, mais pour l'engagement mutuel.
L'article m'a brassé de nombreux aspects. Cette thématique de la maladie, de la mortalité et de l'intimité partagée avec quelqu'un-e m'ayant fréquemment interrogé et tourmenté. Testé, échoué, rectifié. Quoi dire, comment le dire, quand le dire... comment le vivre, le faire vivre (dois-je ?), l'arranger, l'harmoniser, le composer... le supporter, l'insupporter...
Je n'ai jamais pu estimer que le-la partenaire prend sa décision de vivre quelque chose d'intime avec moi, et que basta, il-elle se responsabilise de son choix. Le-la partenaire, malgré toute la littérature et l'attention apportée au fonctionnement de la maladie, sait généralement très peu ce que son choix va concrètement encaisser de chronicité. Ce que moi je connais et perçois minutieusement. Avec toutefois la plus déroutante part d'imprévisible : tout ce que le-la partenaire va m'apporter comme énergies, comme forces vitales insoupçonnées. Et c'est cet ingrédient alchimique de l'autre, son pouvoir néguentropique, qui bien souvent bouleverse une des premières questions qui plane lors d'une rencontre : combien de temps de vie reste-t-il ?

Avec Izlé je me suis retrouvé à mentir ou je-ne-sais-quoi, à vrai dire complètement paumé entre :
       1) la vérité théorique/statistiquaire jadis informée à des partenaires, ne s'étant pas réalisée [du fait de ?] mais ayant pour autant fait fuir. Et m'ayant appris à toute cette époque que bon nombre de valides ne savent pas ralentir l'urgence, cet art de savoir combiner une lente érotique de l'intensité.
       2) L'envie cette fois-ci de prendre en compte la vivacité immédiatement ressentie en moi de connexion avec Izlé, d'intégrer cette force surprenante aux stats de « Capacité Vitale », vivifier les mathématiques somatiques.
       ... Je crois lui avoir dit disposer d'encore une dizaine à quinzaine d'années à vivre. La seconde d'après il y a eu un tournis en moi qui ne m'a pas quitté durant des mois, je me suis vu courir une piste d'athlétisme de l'illusoire "vérité" en ne cessant de m'interroger de si j'avais menti à Izlé, si je m'étais menti, si je niais une part de moi, si je lui dissimulais une part de moi. De bien entendu des questions qui sont assez ineptes, qui ont besoin de mouvements pour exister, de circonstances pour se révéler ; que je souhaitais 'lentir' peu à peu avec Izlé, prendre pleinement le temps de vivre-dire, de cette habilité à déjouer ce qui se perd par ce qui s'emplit.

L'évidence étant qu'être un crevard pour soi-même, c'est une chose, l'être envers quelqu'un-e qu'on aime intimement, c'est autre chose. 
On a beau vouloir nuancer les effets de « la maladie » dans un partenariat intime, la considérer comme un processus avec lequel on chemine, la réalité ramifie plus de complexité.

Pour ma part, probablement depuis mon efficace éducation sociétale/validiste du fardeau que je serais, il est fréquent de questionner si je ne devrais pas vivre solo pour n'embarquer personne d'intime dans ma fin de vie. Molle conclusion pouvant paraître simpliste, peu élaborée, hypocondépressive ; mais une fois de plus l'énonciation porte une différence entre de la théorisation et des ressentis depuis sa propre chair. (Et toujours préférer l'expérimentation à l'interprétation, hmm comme ils disent.) 
Cette éducation validiste (autant que mon validisme intégré, que je combats du mieux possible, mais les possibles ont besoin de ressources sociales justement en pénurie...) m'a formé à montrer socialement la « meilleure part » du malade-&-handi que je suis, c'est-à-dire éviter de se montrer en étant malade, en étant épuisé, en ayant mal de douleurs, ainsi de suite. Lorsque je rencontre quelqu'un-e, professionnellement, personnellement, c'est évidemment cette meilleure part que je prépare et présente, la part convenable qui suscitera chez l'autre une santé tranquillisante. J'ai intégré cela depuis la société validiste dans laquelle j'ai grandi, où il y a toute une pudeur de l'état de maladie qui m'a toujours - et de plus en plus - dérouté. De ces ami-e-s valides qui sont gêné-e-s qu'on vienne les voir à l'hôpital, des « je ne préfère pas que tu me vois aujourd'hui, j'étais malade cette nuit, j'ai une sale gueule », « oh je suis désolé de me mettre à vomir chez toi », « ne regarde pas ma plaie ! », etc. Tout ceci m'a indiqué : être malade ne se montre pas, et surtout ne se partage pas (hors agent-e-s médicaux impersonnel-le-s) (hors demain CHU pneumo+neuro :: blouses blanches :: sang dans paillettes :: couloirs :: silences :: résultats 02/C02 :: comparaison/expertise :: ne pas chialer :: rentrer :: solo :: encaisser).

L'intimité que l'on souhaite avec quelqu'un-e s'ouvre à mesure de la confiance qui est échangée, dont on se sent à même de peu à peu libérer ses 'propres' (!) retenues. Lorsqu'on est plutôt en fin de vie ce processus de libération survient avec ou malgré soi. C'est quelque chose qui est particulièrement observable auprès de personnes âgées [valides au pied du mur ? :)], toutes ces histoires individuelles qui cherchent alors profondément à se déverrouiller, avec beaucoup de beauté même si parfois violente. Quelqu'un-e comme moi de « né malade » effectue de façon précoce ce processus, la préciosité de tout ce qui peut se vivre est densifiée, puis apprise à être distillée, raffinée. 
Mais tout ce mode existentiel paraissant de finesse équivaut à ce que la maladie 'affine' du temps vivable, en cela que la réalité détient une part abrupte derrière sa part poétique. La part abrupte est loin d'être évidente à ouvrir intimement à quelqu'un-e (et la confiance requise ressemblant plutôt chez moi à un terrain miné).

Une maladie - « pathologie dégénérative » - est un ensemble disciplinaire dont chaque spécificité s'impose impérativement au quotidien. 
Telle une anatomie administrative.
Médicamentation # effets secondaires (adaptation, réévaluation) # dégoût gustatif-olfactif # douleurs à multiples degrés et fréquences / rapports endorphiniques # hospitalisations de courtoisie et d'urgences # attentes / impatiences # bureaucraties institutionnelles biopoliticiennes # examens pronostiqueurs # des médecins des spécialistes des médecins des spécialistes des médecins des spécialistes # baisse/fatigue libidinale (plutôt l'inverse chez moi, sorte de thanateros) # tomber malade et retomber malade # préventions / culpabilisations # fièvres # projeter le futur à brève échéance / provoquer le futur à longue échéance # symptomatologie # des questions lancinantes sans réponses rassurantes # décisionnels / hésitations # dégradation visible et sensible # matériel médical # pertes d'autonomie prévisibles ou soudaines (adaptations, limitations, acceptation, négation) # prestataires médicaux capitalistes # fatigue imposante (organique, thermique, psychologique, sensorielle, intellectuelle) # énergies aléatoires # planifier / annuler # précarité technico-financière # idées reçues / perçues / tues.

Tout ceci a une allure de cadeau empoisonné lorsque je réfléchis à me laisser accueillir intimement par quelqu'un-e.
La Violoniste avait dit qu'elle ressentait une certaine jalousie envers mes ADV qui étaient selon elle les seules personnes à me connaître « vraiment » (+ disant souvent que j'étais quelqu'un de très/trop « secret* »), que je laisse accéder presque en permanence à mon corps et à ses variations cliniques. 
Il y a eu cette fois [y'a 6 ans] où elle était présente lors d'un épisode d'urgences d'hosto, avec complication veineuse (le commencement à l'époque...) et j'étais parti au bloc pour la pose d'une fémorale, mon ADV - un excellent de cette période - était évidemment présent pour s'occuper de moi et j'avais dit à la Violoniste qu'elle pouvait rentrer à l'appartement se reposer, mais elle voulait rester. J'étais partagé entre soulagé et embarrassé qu'elle soit là. Mais il y a eu ce moment extrêmement rare. En sortant du bloc chir, choqué, en sueur et avec du sang sur le corps, j'ai voulu aller prendre une douche. La Violoniste aidait l'ADV pour diriger le lit-douche et le pied à perf, puis l'ADV a commencé à me laver... mais dès qu'il m'a touché j'ai éclaté en sanglots, en tremblant fortement, comme si le moindre contact impersonnel devenait d'une intégrale violence. La Violoniste ne m'avait jamais vu ainsi craquer, autant que je pleure très rarement dans les bras de quelqu'un-e. Dans ses bras ce jour-là, nu, perfusé profond en interne de la cuisse, et ensanglanté dans une douche de CHU. Elle a demandé à l'ADV le gant et m'a lavé très doucement, attentionnément. J'étais vulnérable mais n'ai pas eu envie de refuser, là où j'aurais assurément esquivé en d'autres circonstances. Sauf que l'acte médical qui avait été effectué, que ce que la maladie avait commis à ma chair, était une intimité mutilée dont seule une intimité bienveillante pouvait « réhabiliter » du corps, mon accueil. 
C'était la tombée de la nuit, je suis ensuite retourné dans le lit de la chambre clinique et la Violoniste est rentrée à l'appartement. Suis resté longtemps à osciller intérieurement entre la sensation de sa chaleur humaine m'ayant préservé et de ma peur-dégoût de n'avoir de plus en plus que ce corps décharné à proposer à la personne avec qui je vis intimement.

Cette intimité du corps malade me semble à vrai dire la plus absolue. Si les rires, la pensée et la tendresse d'autrui {{qui sont peut-être à vrai dire des organes, et les seuls organes qui vaillent}} arrivent à s'incorporer avec la maladie, ni en conflit ni en négation de celle-ci, ni espérance ni illusion, juste avec, alors... je ne sais pas, j'ai cette image-mot : il n'y aura plus de *retranchement en moi. 
« Retranchement », c'est encore une terminologie guerrière qui s'impose. De la guerre, de la lutte, de la stratégie, de la débâcle, de la défaite. J'en suis fatigué, de cet ennemi - ennami - en moi-même que je n'ose présenter à quiconque, qui me recule en tranchées de plus en plus solitaires, jonchées de cadavres-souvenirs et semblant attendre à accueillir le mien. J'aimerais tellement un autre accueil. Je ne refuse pas la tranchée, j'y suis né, j'aimerais toutefois une promenade paisible dans le champ avant.

Comment fait-on l'amour en temps de guerre.






[La phrase en titre est de Deleuze.]






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Tout autre (quoique), revue de presse expresse :

- pourquoi pas même si bon quelque part au final... : https://paris-luttes.info/anarchisme-petits-chefs-et-auto-1052
- les postillons ignares : http://lesilencequiparle.unblog.fr/2014/04/10/onfray-en-pleine-confusion-de-genre-beatriz-preciado/ 
- à creuser, semble puissant : http://www.theicarusproject.net/about-us.



vendredi 16 mai 2014

« Aussi je rêve à mains nues. »


dans cette file d'attente d'où je me place comme un fantôme assidu
je regarde ma fatigue livide passer entre les corps qui sont de toute façon bien de trop debout pour moi
je bois négligemment deux gorgées de vin par manque de couleurs intérieures, de cavités sensibles, de sinuosités texturées, de folies passagères, de magies murmurées, d'éclats impertinents
jusqu'à ce moment de la musique du type du bar qui passe des vinyles, dont un
me donnant envie que nous nous allongeons par terre
et écoutons la musique, horizontaux, juste pleinement immobiles pleinement audibles
personne ne marchera sur nous hormis la musique par-dessus et le sol par-dessous
tellement envie que tu viennes t'allonger à côté de moi en cette musique
de file latente 



( manque immobile manque audible manque intelligible manque tangible manque sensible )



dimanche 11 mai 2014

Heures.



"Entrepliegues" - Lúa Ocaña






Elle avait dit que ça faisait depuis longtemps qu'elle ne s'était pas endormie le coeur chaud.

Thermodynamiques.
Je m'endors et me réveille désormais froid, un invariable froid. Lorsqu'elle a décidé de partir il s'est déclenché une fièvre ample, comme si le coeur tentait de lutter contre le refroidissement, en incendiaire. De sa tentative il a emporté d'à côté les poumons, qui se sont mis en feu, brûlants. Je ne pleure pas en oculaire mais en pulmonaire, ça suinte.

Elle a raison, ça faisait depuis longtemps que le coeur ne s'était endormi chaud. Ça faisait très rarement qu'il n'avait pas ainsi été chaud. (Et rieur, elle ne peut réaliser comme l'entendre rire me colorait.)
Pour devoir redevenir froid, bien plus froid qu'avant elle qui a sculpté des petits brasiers en moi. Comme personne. Ce qu'elle souhaite que j'éteigne. Plus personne. 
Je feins le tempéré, des sourires climatisés pour les autres. Incapable de la moindre émotion musicale, assourdi. J'entends son prénom partout et nulle part. J'aperçois sa silhouette en des transparences. Je me creuse de questions, j'effrite des blessures, je ronge l'âme du bâtard que je suis.


 ..


La Violoniste m'appelle dimanche dernier, je suis tabassé de fièvre mais décroche d'étonnement, ça fait plus d'un an que nous n'avons pas dialogué (après qu'elle m'ait planté d'un énième rendez-vous parisien). Elle me dit que je lui manque, qu'elle est désolée d'autant être absente... Je la coupe, je ne peux plus entendre cela ; elle le sait, s'emmêle d'une nouvelle piètre excuse à laquelle elle ne croit plus non plus. Je questionne sa vie qu'elle me raconte, j'essaie d'écouter comme je peux mais ça s'enlise en moi. Elle interroge la mienne, je balbutie des bulles de volcan froid à propos du travail, d'un autre projet professionnel, puis un autre. Elle semble attendre, dit que ma voix est terne. Je lui parle d'Izlé. De la lave suave dans mes paroles, puis peu à peu dans ma gorge, jusqu'à mes yeux ; condensation humidification. Elle reste silencieuse, puis ponctue quelque chose comme « tu l'aimes vraiment... », je lui dis oui, mais - à voix basse - que c'est apparemment trop tard, la gorge étroite comme coincée dans une abîme. Alors soudainement la Violoniste se barre, ce qu'elle a toujours fait, elle bredouille qu'elle vient de réaliser qu'elle n'a pas pas le temps de me parler, qu'elle doit impérativement « y » aller, elle dit au revoir, je dis d'accord, elle dit désolé, puis raccroche.
Je reste figé au radeau, j'ai une larme qui se défenestre.

Nous n'avons jamais pu nous parler après la rupture.
Car nous n'avons presque jamais pu nous parler durant la relation, politique partagé mais poétiques divergentes. À l'époque je pensais que le politique pouvait donner lieu à de la poétique, mais non. La poétique ne peut pas donner [des] lieu[x] si elle n'a pas déjà lieu, si elle ne s'enquiert pas d'alchimie/s. la Violoniste recherche généralement des « y », moi des « en ».




...


Le kiné d'urgence :
- C'est dingue, vous connaissez toutes les techniques professionnelles, vous apprenez à vos assistants les gestes qu'on m'a enseigné à l'école... Quand les avez-vous acquis ?
- Gamin. Dans le souci rapide d'être autonome.
- Vous vous gérez comme cela en autonomie, tout seul, depuis combien de temps ?
- Une douzaine d'années.
- Fffff. Vous devez être...
- Épuisé.
- Oui. [Moi des connes de larmes aux yeux, lui étonnamment ému aussi.] Vous savez là vous êtes quand même bien encombré et infecté au niveau pulmonaire, vous luttez depuis plusieurs jours pour ne pas étouffer toutes les 40 minutes, c'est déjà fou que vous y parvenez seul... et vous gérez tout absolument seul depuis toujours... vous avez de quoi être épuisé. Alors là si vous n'en pouvez plus vous pouvez vous faire hospitaliser.
- ...
- Je sais. Mais...
- Je serai autant seul à l'hosto. Avec le même corps, juste lui et moi.
- On pourra vous aider. Même si... oui, à vrai dire vous savez parfaitement vous aider. Écoutez, moi je ne vous sers à rien techniquement là, mais appelez-moi si c'est trop dur, s'il y a trop de questions en vous, ne gérez pas seul actuellement, on en parlera ensemble.
- J'ai appris seul... Je ne sais pas faire autrement. [N'arrive qu'à lui sourire tristement.]
- [Idem.] D'accord, j'ai compris. Je suis impressionné, en tout cas. Vous avez mon numéro...



*



La kyrielle du foutage de gueule des inaccessibilités en France reprend avec ma tentative d'inscriptions pour la rentrée :
- les cours d'espagnol à tarifs avantageux du Centre Culturel Franco-Espagnol qui ne sont pas access car « ont lieu dans une ancienne école »
- ai enfin trouvé une prof de natation disposée à travailler sur des micro-mouvements
(je cherche depuis plusieurs années un-e tel-le prof), sauf que « la piscine où j'enseigne n'est pas accessible » aux handi-e-s, m'indique que ce sera peut-être le cas en 2015
- recherche d'un-e psychanalyste, je précise à chaque fois les modalités nécessaires avec mon fauteuil, bon nombre me répondent « oui c'est accessible, il y a seulement 3 marches pour arriver jusqu'au cabinet », même eu le droit à « il y a juste un petit escalier »
- un dojo de pratique zen qui est access, mais l'honorable responsable ne préfère pas que je vienne au cours collectif car mon fauteuil va prendre « trop de place », signifiant « moins de place pour les valides ».

Suis déjà en train de perdre de façon aiguë la motivation, sachant que ces saynètes pourraient se multiplier par dizaines (en arrivant dans cette ville j'avais écumé une petite centaine de refus de toute sorte pour cause d'inaccessibilités). 
De cette impression exténuée qu'il y a deux mondes, l'Éminent et le subalterne. La rentrée sera évidemment au subalterne, questionnant juste comment continuer d'avoir les énergies de dénoncer l'hypocrisie du discours de mixité sociale & Co de l'Éminent.
[À ce propos, de ces énergies remarquables il y a entre autres :
http://www.cases-rebelles.org. Puis côté juridique :
http://us4.campaign-archive1.com/?u=97d67832bc37bde6812184cfd&id=7250161e6f&e=5f6e26c5f1.]