vendredi 11 janvier 2013

Vortex couch.

Edit (saisi ce matin en traçant une rue) : en fait les plages, les forêts, les lacs et les plaines sont déjà tous en moi.
Je ne sais pas depuis quand, probablement depuis toujours, mais clairement perçus ces quelques années. Je n'ai pas grandi, je me suis élargi.
En moi.
Je peux être un voyage. Si tu veux.






C'est toujours génial le moment en fin d'après-midi où je me dis que je vais rentrer chez moi, dans le calme chaud~tamisé.
C'est toujours crispant aux viscères le moment où après avoir posé mes affaires, allumé les petites lumières, bu/pissé, mis la musique, j'aimerais pouvoir te parler.
(« J'aimerais », quel toupet. J'aimerais aussi fermer ma gueule.)
Ça va durer longtemps. 

Ça va durer tout le temps.
Je le sais. Je compte mes dents, les couleurs du parquet, les ronflements du chat, la densité de l'eau sous la douche, les pages des livres, les vibrations sonores, les éjaculations précoces, et les secondes trop chaudes des chocolats chauds.


Crois-tu que l'on puisse préparer en soi un univers qui ne sera jamais partagé ? Crois-tu qu'être l'ouvrier de soi-même, de son existence, c'est bâtir des ponts jamais reliés ? (Crois-tu vraiment à toutes ces histoires impossibles ?)






 
¤


People talk 1.

Au taf je dois aller voir une potentielle future cliente à son domicile/chambre. Déteste faire le VRP mais requête de la boss. Je frappe à la porte, « ouvrez-ez-ezzz », la dame :
- qui vous êtes ?
- Vous ne me connaissez pas, je suis M. Xavier, l'animateur informatique...
- Je ne vous vois pas, qui vous êtes ?
- Ah, la même chose qu'à l'instant mais en flou, l'animateur informatique...
- Je ne vous entends pas, attendez. [s'approche du fin fond sombre de son studio volets fermés, je la perçois comme un ninja]
- C'est mieux pour vous là ? Je ne veux pas vous embêter, c'est juste que vous étiez sur la liste du précédent animateur informatique, je suis le nouveau, je voulais savoir si... enfin... vous, l'informatique ? Hmmm...
- Mais je ne vous connais pas !
- Exact, tout à fait exact. D'ailleurs c'est réciproque.
- ET POURQUOI VOUS AVEZ RECULÉ MON FAUTEUIL ?!! [fauteuil manuel garé devant sa porte d'entrée]
- Ah je m'y attendais à votre question. Eh bien c'est simple, je l'ai reculé pour pouvoir passer et d'autant plus figurez-vous pour pouvoir le remettre ensuite exactement comme il était, j'adore l'exactitude.
- Alors remettez-le.
- Avec plaisir.
- Mais vous êtes qui alors ?
- Hmmm à vrai dire bonne question, fondamentalement je ne vais pas savoir vous y répondre. Ce n'est pas important. Ici je suis déguisé en animateur informatique, mais pour le reste je ne sais pas plus que ça qui je suis.
- Moi je vais vous dire Monsieur [gentiment, elle a un regard doux], ça ne m'intéresse pas vos statistiques.
- [grand sourire] Ah oui. Bah oui. Je comprends. En fait ça ne m'intéresse pas du tout non plus les statistiques. C'est vrai ça.
- [s'avançant vers moi] Et ne vous approchez pas trop de moi, j'ai un zona très contagieux.
- Okay... Sauf que c'est vous qui vous approchez de moi, mais ça va, je ne vais pas m'inquiéter hein.
- Bon ça tombe bien pour le fauteuil, approchez-le moi, j'ai envie de sortir.
- Oui oui oui. [elle effectue un mouvement aléatoire entre l'escargot et l'orque] Oh euh attention, faut peut-être quand même mettre les freins Madame, là...
- Oh vous vous y connaissez.
- Uuhhh... oui... des fois que vous n'auriez pas remarqué je suis en... je... le fauteuil sous mes fesses quoi... Non, allez on s'en fout.
- En tout cas je vous redis non pour les statistiques.
- Tout à fait, je dis non moi aussi ! Du coup je vais vous laisser hmmm méditer. Si jamais un jour l'informatique ou les statistiques vous intéressent de nouveau, je travaille en bas à la bibliothèque.


Une autre fois où je suis allé voir une cliente listée j'ai découvert une minuscule dame squelettique comme moulée dans son lit, regardant la télé avec un énorme casque audio rafistolé au scotch marron, j'ai appris avec elle à ne pas toujours dire « Internet » mais « informatique » (Internet peut s'avérer extraterrestre), et surtout l'éclat de rire lorsqu'elle m'a vivement retenu de partir en me proposant à 15:30 de « plutôt rester boire l'apéro, allez jeune homme un petit apéro avec moi ! »



People talk 2.

La Violoniste passe en allers-retours sa main devant mon visage (ce que je remarque apparemment tardivement) :
- hey, tu m'écoutes, t'es là ou bien ?
- Je t'écoute, j'écoute toujours tout.
- Sauf que tu es ailleurs, Charles.
- Je ne suis pas complètement là. Je suis toujours un peu ailleurs, tu le sais.
- Oui, mais là tu l'es vraiment, et souvent. Il se passe quoi, tu penses à quoi ?
- ..... On s'en fout, je suis là en partie avec toi quand même, non ?
- Pas vraiment. J'ai vécu 4 ans avec toi Charles, tu étais ailleurs mais aussi là, tu t'en rappelles ?
- Pas beaucoup. Honnêtement j'ai oublié vraiment la majorité des choses.
- [larmes aux yeux] ... T'es sérieux ?
- Oui.
- C'est dur.
- Je ne comprends pas. Ce n'est pas ce que tu voulais, ce que tout le monde veut en me quittant : que j'oublie ?! Oublier, tourner la page, « passe à autre chose », tout ça. J'ai fait cela avec toi, j'ai strictement fait comme tu voulais et comme tout le monde disait. Tu sais que je fais méticuleusement les choses, alors voilà. Maintenant ce serait une erreur de ma part ? Il fallait que je t'oublie sans t'oublier ?
- [yeux tsunami] Non... c'est... fffff... Tu as été ma plus longue relation...
- Exotique.
- MERDE. Mais putain t'en es encore à ne pas croire que je suis resté avec toi parce que je te trouvais attirant, intéressant, beau ?! et que tu es cela. C'est dingue. Tu crois en quoi ?
- Aux gens qui partent n'importe comment. Aux réalité des vides avec lesquels il faut trouver à continuer à vivre.

Et je suis déjà ailleurs dans ma tête,
ni fier ni rassuré,juste je me dis que je ne vais plus jamais faire cela, activer l'oubli, et le réussir en s'oubliant aussi [elle a fait le tour de la cabane, sorti des objets avec lesquels nous avons vécu en relatant des anecdotes que j'ai effacées // je me rappelle juste de la machine à café, des cafés à aimer lui apporter chauds au lit, desquels je me levais avant elle]. C'est une faculté humaine moche. Il paraît que j'ai des facultés démentes, leitmotiv pluri-entendu depuis que je suis gosse, les adultes, les profs*, les médecins ; tous ces gens qui ne font pas ma vie mais qui ont toujours annoncé que je ferai grandement la mienne. Ah bon.



*Il y a 4 ans ce prof de fac en lisant mon journal de recherche m'avait demandé apparemment décontenancé comment ces idées/théories me venaient à l'esprit : je lui avais répondu que simplement je me balade dans la forêt à l'intérieur de moi, je visualise cette forêt. « Je me balade et je regarde, Monsieur, c'est tout, je me balade. »



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